Il lui arrive parfois de se poser la question...si c'est juste son coeur qui tremble ou son corps tout entier. Le Kuentzler n'en est pas vraiment certain. Parce que c'est vrai qu'il fait très froid mais...quand même, il s'en doute bien: dans sa poitrine aussi, c'est le pôle nord. Avec un étaux de glace pour dévorer son palpitant. Alors forcément, forcément, son bonheur s'effrite un peu. Son sourire a quelque chose de figé et lorsqu'on lui pose une question, le gitan semble ailleurs, cent fois plus que d'habitude. Un peu comme s'il avait finalement trouver le moyen de s'envoler sur la lune avec toutes ses pensées.
C'est que noël approche à grand pas.
Et...il n'y a rien, absolument rien de plus angoissant que ça.
On en parle à la radio, à la télé, entre deux cours, entre deux verres et même dans les rayons du supermarché.
Tout le monde est poli pour l'occasion, les crachats d'hier se transforment en poignet de mains et les regards de travers se sont éteint( jusqu'au 31 décembre tout du moins). A croire que la magie fonctionne bel et bien...mais bon...
Ça ne change pas grand chose à la vie du gitan. 24 ou 25 décembre, Ringo sait déjà qu'il le passera tout seul une fois encore.
Parce qu'il n'y a pas de pardon pour les bâtards chez Kuentzler. La naissance du divin n'excuse rien.
C'est peut être pour ça qu'il a le coeur au bord des lèvres lorsqu'il pénètre dans la salle de danse. Son reflet lui semble terriblement fâde et il détourne le regard, un peu peiné.
C'est un jour parfait pour se noyer dans son lit (ou dans les bras de Basile, au choix). Ca n'empêche qu'il décroche un sourire lorsqu'il aperçoit la silhouette de Lev...Lev...oh, sa silhouette lui donne envie de ravaler toute sa peine afin d'être à la hauteur.
Alors il inspire doucement et lève la main pour le saluer, bon acteur. Ringo n'a pas le droit de lui couper les ailes seulement parce qu'il a froid.

Noël n'a jamais eu vraiment d'importance capitale, pour Lev. Enfant unique ( du moins du côté de sa mère ) dans un quartier un peu craignoss avec une mère un peu absente.. disons qu'ils n'ont jamais fêté ça réellement.
Donc Noël, ça ne lui laisse aucun souvenir particulier en tête. Ni doux, ni amer. Ni bon, ni mauvais. Une période comme les autres. C'est pour ça qu'il va danser, Lev, aujourd'hui, si près des fêtes. Parce que dehors, les gens se pressent. Et lui, il a besoin de se presser contre le vide. Longtemps qu'il n'a plus vraiment eu de partenaire de danse.
Longtemps, depuis Aurore, en réalité.
Il ne veut pas y penser. Il pénètre dans la salle avec un sourire rêveur et naïf aux lèvres. Le seul moment où il s'autorise à être un enfant. Mais la salle n'est pas vide. Et c'est Ringo qu'il y découvre.
Là, son sourire s'agrandit. De chaleur, pour lui réchauffer un peu le coeur, à Ringo. Parce que Ringo, il voit bien qu'il a froid à l'intérieur. Un peu comme lui. Que son organisme est devenu un pays où c'est l'hiver toute l'année. Toute l'année, sauf quand ils sont là et qu'ils sont ensemble pour faire ce qu'ils aiment le plus. Ringo ne danse pas. Mais le Clastrov aime à se dire qu'il donne vie à sa danse, quand il est là. « hé, salut ringo. » Lev, il a toujours une voix un peu forte et un peu chaude à la fois. Presque charmeuse tout le temps, comme un peu pas fait exprès.
Même si des fois, il se demande s'il ne le fait pas exprès, avec Ringo. Il s'approche tranquillement. Il est en survêtements, il est à l'aise, il se fiche de se montrer comme ça devant Ringo. Comme s'il le connaissait depuis longtemps. Comme si c'était un peu lui, en face. « t'es venu jouer un peu ? » demande-t-il avec un air un brin innocent. La vérité, c'est qu'il l'espère vraiment.